Actualité : Une galerie des Glaces plus authentique
Depuis peu, la Galerie des Glaces se dévoile sous une lumière plus fidèle à celle de l’Ancien Régime. Si, lors des rares grands bals qui y furent donnés, notamment pour les mariages des Dauphins, des milliers de bougies illuminaient les verreries, cet éclairage de « salle de bal » était démonté par les Menus Plaisirs aussitôt après. Les lustres sont des accessoires et ne font pas partie du décor de la galerie. Le choix en 1980 d’évoquer en permanence l’atmosphère de ces grandes fêtes répondait à un besoin d’animer le château mais venait en contradiction avec l’aspect véritable, grandiose et solennel, de la Galerie telle qu’elle fut conçue sous Louis XIV.
À partir de l’été 2025 et dans le cadre de travaux historiques, une partie des lustres sont retirés au profit d’un éclairage plus équilibré. Celui-ci repose essentiellement sur les vingt-quatre torchères qui avaient également été recréées en 1980, avec leurs girandoles, et quelques lustres tels qu’ils ont pu être maintenus à certains moments du XVIIIe siècle.
Cette mise en lumière rend à la galerie la subtilité et la poésie de ses jeux d’ombre et de reflets, modelés par les 17 fenêtres et les 17 arcades de miroirs. Elle permet aussi de redécouvrir deux grands chefs-d’œuvre, le monument de Jules Hardouin-Mansart avec ses proportions inouïes, et le plafond peint par Charles Le Brun, désormais mieux éclairé, avec son grand récit des hauts faits de Louis XIV.
La galerie des Glaces
Après la victoire sur les trois puissances liguées, représentées au salon de la Guerre, la galerie exalte tout au long de ses soixante-treize mètres les succès politiques, économiques et artistiques de la France. Succès politiques : les trente compositions de la voûte peinte par Le Brun illustrent l’histoire glorieuse de Louis XIV durant les dix-huit premières années de son gouvernement personnel, depuis 1661 jusqu’à la paix de Nimègue. Ainsi, victoires militaires et diplomatiques aussi bien que réformes en vue de la réorganisation du royaume y sont traitées sous forme d’allégories à l’Antique. Prospérité économique : par leurs dimensions et par leur nombre, les trois cent cinquante-sept miroirs qui ornent les dix-sept arcades faisant face aux fenêtres attestent que la nouvelle manufacture française de glaces est capable de ravir à Venise le monopole des miroirs, alors objets de grand luxe. Réussite artistique : les pilastres de marbre de Rance s’ornent de chapiteaux de bronze doré d’un modèle nouveau dit de « l’ordre français », créé par Le Brun à la demande de Colbert, il présente des emblèmes nationaux : une fleur de lys surmontée du soleil royal entre deux coqs gaulois (coq se disant gallus en latin).
La galerie des Glaces servait quotidiennement de lieu de passage, d’attente et de rencontres, fréquentée par les courtisans et le public des visiteurs. Elle ne servit qu’exceptionnellement de cadre à des cérémonies, lorsque les souverains voulurent donner le plus grand éclat à des divertissements (bals ou jeux) offerts à l’occasion de mariages princiers ou à des réceptions diplomatiques. Dans ces dernières occasions, le trône était alors installé sur une estrade tout au bout de la galerie, du côté du salon de la Paix dont l’arcade était fermée. La mise en scène du pouvoir a rarement atteint un tel degré d’ostentation. C’est ainsi que le doge de Gênes en 1685, les ambassadeurs de Siam (1686), de Perse (1715) et de l’Empire ottoman (1742) durent traverser toute la galerie, sous les yeux de la Cour massée de chaque côté sur des gradins pour parvenir jusqu’au roi.
C’est également ici que fut signé le 28 juin 1919 le traité de Versailles qui mettait fin à la Première Guerre mondiale. Depuis, les présidents de la République continuent à y recevoir les hôtes officiels de la France.
Le plafond de charles le brun : un manifeste politique en peinture
Chef-d’œuvre de la peinture décorative du règne de Louis XIV, le plafond de la Galerie des Glaces, imaginé et réalisé par Charles Le Brun entre 1680 et 1684, délaisse les références mythologiques classiques pour bâtir une iconographie centrée sur le roi. Louis XIV y apparaît comme une figure triomphante, entouré de divinités, de dragons et de personnages allégoriques, illustrant les grandes étapes de son action politique et militaire. À travers ces scènes, le plafond célèbre un roi conquérant et pacificateur, bâtisseur d’un nouvel ordre européen.
La scène centrale, « Le Roi gouverne par lui-même », représente le monarque quittant l’insouciance de l’enfance, symbolisée par des enfants qui jouent au premier plan, pour s’emparer de son destin de gouverneur, représenté par un gouvernail. Chaque tableau est accompagné d’un cartouche explicatif, comme une bande dessinée baroque, dont les légendes, sobres en apparence, sont issues de la plume de Boileau et Racine, des poètes majeurs du XVIIe siècle nommés historiographes du roi. On y décèle également des allusions à d’autres cultures, telle une armure de samouraï témoignant de la curiosité du roi pour le monde entier.
Le salon de la Guerre
C’est à partir de 1678 qu’Hardouin‑Mansart entreprit la construction du salon de la Guerre. La décoration, achevée par Le Brun en 1686, exalte les victoires militaires qui aboutirent à la paix de Nimègue. Les murs sont revêtus de panneaux de marbre ornés de six trophées et de chutes d’armes en bronze doré. Le mur du côté du salon d’Apollon est occupé par un bas-relief ovale en stuc représentant Louis XIV à cheval foulant aux pieds ses ennemis. Ce chef-d’œuvre de Coysevox est surmonté de deux Renommées dorées et soutenu par deux captifs enchaînés. Au-dessous, dans le bas-relief occultant l’ouverture d’une fausse cheminée, Clio, muse de l’Histoire, consigne pour la postérité les hauts faits du roi. Le plafond en coupole représente au centre La France armée, assise sur un nuage et entourée de Victoires. Un portrait de Louis XIV orne son bouclier. Dans les voussures sont représentés ses trois ennemis vaincus : l’Allemagne à genoux, avec un aigle ; l’Espagne menaçante, avec un lion rugissant et la Hollande renversée sur un autre lion. La quatrième voussure représente Bellone, déesse de la guerre, en fureur entre la Rébellion et la Discorde.
Le salon de la Paix
Le salon de la Paix présente le même décor de panneaux de marbre et de trophées d’armes de bronzes dorés et ciselés que le salon de la Guerre qui lui est symétrique. Toutefois, Le Brun a orné la coupole et les voussures des bienfaits de la paix donnée par la France à l’Europe. Ce salon fut, dès la fin du règne de Louis XIV, séparé de la galerie par une cloison mobile et considéré comme faisant partie de l’Appartement de la Reine dont il constitua dès lors la dernière pièce après la chambre. C’est là que sous Louis XV, Marie Leszczynska donna chaque dimanche des concerts de musique profane ou religieuse qui jouèrent un rôle important dans la vie musicale de Versailles, et que, sous le règne suivant, Marie-Antoinette tint son jeu. Lorsqu’il le fallait, la cloison séparant la pièce de la galerie était démontée et le salon faisait de nouveau partie du Grand Appartement du Roi.
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